Stocker les gaz sous forme liquéfiée permet de réduire considérablement
le volume occupé. 1 tonne de butane sous forme gazeuse à pression
atmosphérique occupe 400m3, tandis que sous forme liquide la même tonne
de butane n'occupe que 1,7 m3. La forme liquide permet donc de stocker
jusqu'à 230 fois plus de matière dans le même volume.
Il y a deux manières de stocker les gaz liquéfiés:
- sous pression à température ambiante
- à basse température (stockage cryogénique)
Stockage
sous pression
Les équipements adaptés au stockage sous pression sont principalement
des réservoirs
cylindriques, en position horizontale ou verticale, ou bien des sphères.
La forme sphèrique permet une meilleure résistance à la pression de
la paroi du réservoir. L'épaisseur de métal nécessaire pour résister à
la pression interne peut être la moitié de ce
qu'elle serait pour un réservoir cylindrique de même capacité. Elle
sera préférée pour les stockages de forte capacité.
Les formes cylindriques permettent une meilleur intégration dans un
environnement encombré. Elles seront privilégiées pour les stockages
intermédiaires en unité de production.
Dans
un stockage sous pression, le gaz est stocké à température ambiante. La
pression qui s'établi dans le réservoir correspond à la tension de
vapeur du liquide.
Précautions
d'installation
Les gaz liquéfiés sont stockés sous forme de liquide saturé. Toute
augmentation de température se traduira par une augmentation de la
pression interne du stockage. Il convient de déterminer soigneusement
la température maximale de stockage en exploitation pour en déduire la
pression maximale de service du récipents.
S'ils sont pris dans un incendie, qu'ils soient combustibles ou non,
ils peuvent être la source d'un phénomène de BLEVE (Boiling Liquid
Expanding Vapour Explosion), extrêmement dévastateur. Des moyens
particuliers de prévention et de lutte contre l'incendie doivent être
envisagés; parmis les plus classiques, on peut citer:
- ignifugation
- installation sous talus de terre
- système d'arrosage individuel et automatisé
- aménagement d'une cuvette de rétention déportée
Le phénomène de BLEVE est particulièrement violent
si la température du fluide au moment de la rupture de l'enveloppe
dépasse une certaine valeur nommée Température Limite de Surchauffe
(TLS). A cette température correspond une pression de saturation à
laquelle le réservoir sera soumis. Pour éviter de se trouver dans cette
situation, il est recommandé de limiter la pression du réservoir à une
valeur inférieure à cette pression de saturation. En cas d'incendie
environnant, la soupape limitant la pression du réservoir déchargera
continuellement, en lieu sûr, le débit de gaz généré.
Stockage
cryogénique
Le stockage sous pression de larges volumes de gaz liquéfié peut
conduire à des équipements ayant des épaisseurs de paroi excessives. On
préfèrera alors un stockage à basse température, permettant d'opérer à
plus
faible pression.
Ces
réservoirs opérant à des températures beaucoup plus basses que la
température ambiante, demandent une isolation thermique poussée. Elle
est obtenue grâce à une double enveloppe:
- l'enveloppe interne, réalisée en aluminium ou en acier
inoxydable (pour garder une résilience mécanique sufffisante à basse
température) contient le liquide à stocker.
- l'enveloppe externe généralement en acier carbone est
destinée à assurer la stabilité de la construction et l'étanchéité vis
à vis de l'air ambiant.
L'espace entre les deux enveloppes, est comblé par un isolant thermique
(généralement de la perlite) et maintenu sous vide..
Les réservoirs de capacité supérieure à 5000m
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sont réalisés à fond plat et ne
peuvent résister à aucune surpression (au delà de la pression
atmosphérique)
Les réservoirs capable de résister à une surpression nécessitent la
réalisation de fonds bombés. La réalisation de ces fonds bombés limite
la taille maximum de ces réservoirs. De plus, leur résistance à la
pression diminue quand la taille augmente.
Malgré une isolation thermique soignée, un léger transfert
thermique provenant de l'environnement extérieur, sera observé.
Si la pression maximale admissible du réservoir est proche de la
pression normale d'exploitation, aucune augmentation de pression ne
pourra être tolérée, et un débit continu de gaz vaporisé sera constaté
et devra être traité. Il pourra par exemple:
- être liquéfié
- alimenter un réseau d'utilisation du gaz
- être torché s'il est combustible
- être absorbé ou neutralisé dans une installation appropriée
Si une marge utile entre la pression normale d'exploitation du
stockage
et sa pression maximale admissible existe, le transfert thermique
depuis l'environnement du réservoir provoquera une lente augmentation
de sa température et de sa pression.
Réservoirs
atmosphériques
Ces
réservoirs dont l'exploitation est plus contraignante, sont destinés
aux capacités les plus élevées, typiquement supérieures à 5000m3.
Plusieurs principes de construction sont proposés:
- réservoirs à simple enveloppe
- la paroi unique
du réservoir, construite en matériaux résistant aux basses
températures, assure sa stabilité mécanique.
L'isolant thermique sur les parois latérales, disposé à l'extérieur,
sera composé de panneaux de mosse rigide. Il doit être protégé des
agressions et muni d'une barrière efficace contre la pénétration
d'humidité. Il est monté sur une dalle en béton. Un isolant thermique
disposé sur le fond est destiné à prévenir le gel du sol qui pourrait
dégrader les fondations. Une paroi isolante interne peut être suspendue
au-dessus du niveau du liquide.
- à compartiment unique et double enveloppe
- la
paroi unique du réservoir est constituée d'une enveloppe interne en
acier résistant aux basses températures, et d'une enveloppe externe en
acier carbone. L'espace entre les deux est remplie d'un isolant
thermique. Celui-ci peut être de la perlite en vrac.
- à compartiment unique et membrane d'étanchéité
- l'enveloppe
externe est faite d'une structure en béton. L'étanchéité est assuré par
une membrane en acier inoxydable résistant aux basses températures pour
la partie en contact avec le liquide, et en acier carbone pour le dôme.
La membrane d'étanchéité repose sur des panneaux isolants en mousse
rigide. Une membrane d'étanchéité secondaire protège les éléments de
fondation en cas de fuite de la membrane principale.
- à double compartiment
- le
liquide est stocké dans le compartiment interne réalisé en acier
résistant aux basses températures. Il est enfermé dans un compartiment
externe étanche et isolé, destiné à contenir une fuite éventuelle de
liquide du compartiment interne.
Matériaux
utilisables
L'acier carbone et les matières plastiques deviennent rapidement
cassants à basse température. L'usage de l'acier carbone est
limité à des températures supérieures à -20°C à moins qu'il ai subit un
traitement particulier de désoxygènation. Il est alors dit "calmé" est
peut être utilisé jusqu'à -40°C.
Pour les applications cryogéniques, les
matériaux les mieux adaptés sont:
- les aciers inoxydables austénitiques
- les aciers à 9% de nickel
- les alliages d'aluminium, tels que les types 5083 et 6003,
utilisables jusqu'à la température normale de l'hélium liquide (-269°C)
- les alliages de cuivre
Isolation
thermique
L'isolation thermique des réservoirs à basse température doit
satisfaire aux exigences suivantes:
- limiter l'échauffement du liquide qui génèrera un débit de
gaz qu'il faudra traiter
- interdire la pénétration d'air humide en direction de la
paroi froide du réservoir, qui conduirait à l'accumulation d'humidité,
de glace et à une corrosion sous l'isolant.
- être non combustible et résister à un incendie environnant
- être mécaniquement résistant pour résister aux piétinements
lors des opérations de maintenance sans perdre son étanchéité
Les
isolants peuvent être:
- des panneaux de mousse rigide découpés et assemblés
- des panneaux de laine de verre
- de la mousse injectée
- de la perlite
Les isolant sont caractérisés par leur conductivité thermique.
Celle-ci est de l'ordre de 0,04W/m/K.
La performance de l'installation est évaluée par le débit de
gaz généré en flux continu. Il devra être de l'ordre de 0,05 à 0,1% de
la capacité du réservoir, par 24h.
Phénomène
de Rollover
Ce phénomène est abondament décrit à propos des stockages de gaz
naturel liquéfié, mais par sa nature il pourrait se produire pour tout
mélange de gaz liquéfiés.
Il suppose qu'une stratification de couches de densités différentes se
produise dans le réservoir. Avec le temps et l'apport progressif de
chaleur de l'extérieur, la couche supérieure, la moins dense perd
progressivement ses composants les plus légers (les plus volatils et
les moins denses) et voit sa densité augmenter, tandis que la couche
inféreure s'échauffe, sans pouvoir dégazer puisque maintenue sous une
pression hydrostatique supérieure. Sa densité donc tend à diminuer.
Aucun mouvement de convection entre les deux couches ne se produit tant
qu'une différence de densité persiste. Les densités des deux couches se
rapprochant, il arrive le moment où la couche inférieure parvient à
pénétrer la couche supérieure et à dégazer à son tour. Mais la chaleur
accumulée par la couche inférieure pendant la phase précédente, fait
que son dégazage est:
- plus intense que le débit normal (plus de dix fois le débit
normal selon les expériences rapportées)
- et prolongé (plusieurs jours)
Aucune conséquence matérielle n'est cependant à craindre si les
soupapes de dégazage du bac sont dimensionnées en conséquence.
La nomenclature des installations classées fait généralement
référence au volume de produit stocké pour déterminer le classement de
l'installation.
Les textes règlementaires définissent les GAZ COMBUSTIBLES
LIQUEFIES
comme des s combustibles dont la pression absolue de vapeur à 15°C est
supérieure à la pression atmosphérique (100000Pa).
Ils sont dit SOUS PRESSION si leur température est telle la pression
absolue de vapeur est supérieure à 160000Pa (0,6bars effectif).
Pour les réservoirs aériens de plus de 50t de GAZ COMBUSTIBLE
LIQUEFIE,
l'arrêté du 2/1/2008 défini les moyens de:
- contrôle de niveau
- contrôle de pression
- détection et limitation de fuites
- protection contre l'incendie
Les réservoirs opérant sous une pression supérieure à 0,5 bar
effectif, doivent satisfaire aux exigences de la réglementation sur les
équipements sous pression.
Caractéristiques
de quelques gaz liquéfiés
|
Temp
normale d'ébullition
[°C] |
Pression
à 20°C
[bars] |
Temp
critique
[°C] |
TLS
[°C] |
Pression
à TLS
[bars] |
Ammoniac |
-33,4 |
8,6 |
132,45 |
91,9 |
49,7 |
Cyclopropane |
-32,8 |
6,2 |
124,65 |
84,9 |
26,9 |
Chlorure
de méthyle |
-23,8 |
5 |
143,15 |
101,5 |
31,9 |
iso-Butane |
-11,7 |
3,1 |
134,95 |
94,1 |
17 |
Diméthyl
amine |
7,4 |
1,9 |
|
|
|
Dioxyde
d'azote |
21,1 |
0,96 |
158,25 |
115,1 |
28,4 |
n-Butane |
-0,5 |
2,1 |
152 |
105 |
16,3 |
Diméthyl
éther |
-24,8 |
5 |
126,85 |
86,9 |
28,2 |
Phosgène |
7,6 |
1,6 |
181,85 |
136 |
25 |
Butène-1 |
-6,3 |
2,6 |
146,45 |
104 |
19 |
Ethyl
amine |
16,6 |
1,2 |
182,55 |
137 |
29 |
Propane |
-42 |
8,3 |
96,7 |
59 |
20 |
Butène-2-cis |
3,7 |
1,8 |
|
|
|
Chlorure
d'éthyle |
12,3 |
1,3 |
187,2 |
141 |
24 |
Propylène |
-47,7 |
10,3 |
91,85 |
55 |
22 |
Butène-2-trans |
0,9 |
2 |
|
|
|
Oxyde
d'éthylene |
10,5 |
1,4 |
195,85 |
149 |
36 |
Dioxyde
de soufre |
-10 |
3,3 |
157,65 |
114 |
36 |
Chlore |
-34,1 |
6,9 |
143,85 |
102 |
39 |
Méthyl
amine |
-6,3 |
3 |
156,85 |
114 |
38 |
Triméthyl
amine |
2,9 |
1,9 |
160,05 |
116 |
21 |
Ethane |
-88,6 |
35,4 |
32,25 |
1 |
24 |
Ethylène |
-104 |
supercritique |
9,25 |
-19 |
25 |
Chlorure de vinyle |
-13,4 |
3,1 |
156,55 |
113 |
22 |
Dioxyde de carbone |
-78,5 |
|
31,05 |
0,6 |
|
Argon |
-186 |
supercritique |
-122,4 |
-137 |
25 |
Azote |
-196 |
supercritique |
-147 |
-160 |
16 |
Oxygène |
-183 |
supercritique |
-118,6 |
-134 |
26 |
Hélium |
-268 |
supercritique |
-268 |
-268 |
1,5 |
Méthane |
-161 |
supercritique |
-82,55 |
-101 |
23 |
TLS: Température Limite de Surchauffe pour le phénomène de
BLEVE
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web
European Industrial Gases Association