Les colonnes garnies sont le plus souvent utilisées pour assurer
un contact intime et faciliter le transfert de matière entre un liquide
et un gaz dans:
- des absorptions (lavage d'un gaz pour en éliminer un
polluant)
- des stripping (entrainement par un gaz, d'un polluant
présent dans un liquide)
- des distillations ( séparation de composants suivant leur
volatilité)
L'efficacité du garnissage pour le transfert de matière entre
la phase liquide et la phase gazeuse est exprimée par la HEPT ou la HUT:
- HEPT (Hauteur Equivalente à un Plateau Théorique) ou HETP
(Height Equivalent to a Theoretical Plate) en anglais est la hauteur de
garnissage nécessaire pour obtenir un échange correspondant à un
plateau théorique.
- HUT (Hauteur pour une Unité de Transfert) ou HTU (Height
for one Transfer Unit) en anglais est la hauteur de garnissage
nécessaire pour obtenir un échange correspondant à une unité de
transfert
On la trouve également exprimée en nombre de plateaux théoriques au
mètre ou en nombre d'unité de transfert au mètre.
Dans un transfert à contre courant, pour chaque plateau
théorique, la composition du gaz s'échappant par le haut, est en
équilibre avec le liquide s'écoulant vers le bas.
La hauteur d'une unité de transfert (HUT) est définie comme la hauteur
de garnissage nécessaire pour produire un changement de composition
égal à la différence de composition entre les deux phases.
Les mécanismes gouvernant le transfert de matière sur un
garnissage sont si complexes qu'aucun modèle théorique ne s'est imposé
pour la prédiction de la hauteur de garnissage nécessaire. Les règles
empiriques semblent encore donner les résultats les plus sûrs.
Une des règles les plus simples lie la HEPT à la surface spécifique du
garnissage:
HEPT = 93⁄a
ce qui donne pour des anneaux Pall métal
Taille
[mm] |
a
[m2/m3] |
HEPT
[m] |
10 |
515 |
0,18 |
15 |
360 |
0,25 |
25 |
215 |
0,43 |
38 |
135 |
0,7 |
50 |
105 |
0,9 |
90 |
78 |
1.2 |
Cependant, pour les colonnes de faible diamètre
(<0,6m), il est recommandé de retenir une HEPT égale au diamètre
de la colonne. Pour les applications sous vide, il est recommandé
d'ajouter 0,1m à la valeur trouvée selon les critères précédents.
La hauteur nécessaire de garnissage est simplement le
produit du nombre de plateaux théorique nécessaire pour faire
la séparation ou l'absorption par la HEPT.
Equilibre
gaz/liquide
Comme en distillation, la relation entre la composition de la phase
liquide et celle de la phase gazeuse en équilibre s'exprime par le
coefficient d'équilibre: K = y
/ x
Les méthodes pour déterminer le coefficient d'équilibre incluent:
- la loi de Henry pour les systèmes très dilués
- la loi de Raoult pour les systèmes idéaux
- toute méthode adaptée pour les systèmes non idéaux
Coefficient
de Henry
Si le soluté est très dilué tant dans le gaz que dans le liquide,
souvent on peut considérer que la loi de Henry s'applique: la masse de
gaz
qui
peut se dissoudre dans un liquide est directement proportionnelle à sa
pression.
Le coefficient de proportionnalité entre la pression partielle
d'un gaz et sa concentration à l'équilibre dans le liquide est nommé
coefficient de Henry (
H
σ,s).
Attention!
plusieurs définitions co-existent; par exemple:
H
σ,s =
Pσ
/ Xσ
ou
H
σ,s =
Yσ / Xσ =
Pσ
/ Ptot
/
Xσ
avec:
H
σ,s: coefficient de Henry du soluté "σ" dans le
solvant "s"
P
σ: pression partielle du soluté "σ" dans le gaz
Ptot
: pression totale
X
σ: fraction molaire du soluté "σ" dans le
liquide
Y
σ: fraction molaire du soluté "σ" dans le gaz
Bilan matière
Une substance clé est définie pour permettre les bilans
matière. C'est en général le soluté qu'on souhaite transférer d'une
phase vers l'autre.
Le bilan matière de l'échange peut s'écrire des manières suivantes:
débit de la substance depuis ou vers la phase liquide:
L(Xe - Xs)
= débit de la substance vers ou depuis la phase gaz:
G(Ys - Ye)
avec:
L, G: débit de liquide et de gaz
X, Y: teneurs en substance clé:
- dans le liquide en entrée (Xe)
- et en sortie (Xs),
- dans le gaz en entrée (Ye)
- et en sortie (Ys)
si X et Y représentent des fractions molaires (mole/mole), L et G
exprimeront des débits molaires (mole/h)
si X et Y représentent des concentrations (mole/m³), L et G exprimeront
des débits volumiques (m³/h)
si la concentration en substance à transférer est exprimée en pression
partielle dans la phase gaz:
L(Xe - Xs) = G[m³/h](Ps
- Pe) ⁄ RT
L(Xe - Xs) = G[M/h](Ps
- Pe) ⁄ Ptot
Si les concentrations en soluté sont faibles, les débits de gaz et de
liquide peuvent être considérés comme constants entre l'entrée et la
sortie. Par contre si les concentrations en soluté sont importantes, il
est plus exact de considérer le débit de diluant inerte; les
concentrations deviennent alors:
L', G': débit de diluant
X', Y': concentration (mole/mole diluant, mole/m³ diluant)
Débit minimum
En absorption comme en stripping, le flux à absorber ou à stripper est
fixé par le procédé amont ou aval, tandis que le flux
d'absorbant ou de gaz de stripping est à définir en fonction
de l'efficacité du contacteur. Le débit minimum correspond à un
fonctionnement idéal tel que:
- en absorption, le liquide en sortie est en équilibre avec
le gaz en entrée (Xs =
Xs* = Ye ⁄ K)
Lmin = G(Ys -
Ye) ⁄ (Xe - Ye ⁄ K)
- en stripping, le gaz en sortie est en équilibre avec le
liquide en entrée (Ys = Ys* = K×Xe)
Gmin = L(Xe
- Xs) ⁄ (K×Xe
- Ye)
Au débit minimum de liquide d'absorption ou de gaz de stripping, la
surface d'échange ou le volume de garnissage est théoriquement infini.
Pour des raisons économiques, on cherchera à ce que le débit effectif
soit d'environ 125% du débit minimum.
Rendement
du transfert
Le
rendement du transfert est la fraction du soluté présent dans le flux
entrant, qui est transféré. A 100% de rendement, le flux entrant est
totalement débarassé du soluté présent.
en stripping:
Rdt = (Xe - Xs) ⁄ Xe
ou bien en absorption:
Rdt = (Ye - Ys) ⁄ Ye
Efficacité
du contacteur
L'efficacité
du contacteur s'évalue en comparant la quantité de matière transféré, à
la quantité maximum transférable compte tenu du bilan matière et des
équilibres.
Le transfert maximum est atteint quand:
- en contre-courant, la composition de l'un des flux en
sortie est en équilibre avec le flux en entrée
- en co-courant, les deux flux en sortie sont en équilibre
Φ ⁄ Φ
max = (Xe - Xs) ⁄ (Xe - Xs*)
ou bien
Φ ⁄ Φ
max = (Ys - Ye) ⁄ (Ys* - Ye)
Hauteur
de garnissage
Dans
une colonne à garnissage le contact entre le gaz et le liquide est
continu. Le dimensionnement d'un contacteur à garnissage s'apparente au
dimensionnement d'un échangeur de chaleur.
Le
flux d'échange de matière entre les deux phases suit une
loi de Fick. La loi de Fick est l'équivalent de la loi de Fourrier pour
les échangeurs de chaleur. Ici le flux de matière échangé est
proportionnel à l'écart de composition entre ce quelle est et ce
qu'elle serait à l'équilibre avec l'autre phase; il s'exprime
en se référant à la phase liquide, par:
L(Xe - Xs) = KLa ΔXML
S×Z
en se référant à la phase gaz, par:
G(Ys - Ye) = KGa ΔYML
S×Z
avec:
K
L, K
G: coefficient
global de transfert de matière se référant au liquide ou au gaz
a: surface spécifique effective du garnissage (m²/m³)
S: section de la colonne garnie (m²)
Z: hauteur garnie (m)
ΔX
ML, ΔY
ML: différence
moyenne logarithmique de composition à l'équilibre pour la phase
liquide et gaz
ΔXML = [(Xe -
Xe*) - (Xs - Xs*)] ⁄ ln[(Xe - Xe*) ⁄ (Xs - Xs*)]
ΔYML = [(Ye -
Ye*) - (Ys - Ys*)] ⁄ ln[(Ye - Ye*) ⁄ (Ys - Ys*)]
teneurs en substance clé:
- dans le liquide en entrée (Xe)
- et en sortie (Xs),
- dans le gaz en entrée (Ye)
- et en sortie (Ys)
- dans le liquide en équilibre avec le gaz de sortie (à
contre-courant: Xe* = Ys ⁄ K; à co-courant: Xs* = Ys ⁄ K)
- et avec le gaz en entrée (à contre-courant: Xs* = Ye ⁄ K; à
co-courant: Xe* = Ye ⁄ K)
- dans le gaz en équilibre avec le liquide en sortie (à
contre-courant: Ye* = K×Xs; à co-courant: Ys* = K×Xs)
- et avec le liquide en entrée (à contre-courant: Ys* = K×Xe;
à co-courant: Ye* = K×Xe)
si la loi de Henry s'applique:
K = Hσ =
Y
⁄ X*
La surface spécifique du garnissage "a" est celle qui
participe
réellement à l'échange; ce n'est pas une donnée purement géométrique et
elle n'est généralement pas accessible. C'est pourquoi le plus simple
est de déterminer expérimentalement le produit KG·a.
C'est cette valeur qui est reportée dans les brochures des fournisseurs
de garnissage.
Hauteur
d'unité de transfert
Une
unité de transfert correspond à une variation de concentration égale à
la différence moyenne de concentration entre les deux phases. Pour les
systèmes très dilués:
NUTL = (Xe -
Xs) ⁄ ΔXML
NUTG = (Ys -
Ye) ⁄ ΔYML
La hauteur nécessaire pour effectuer l'échange correspondant à une
unité de transfert se calcule à partir du coefficient global de
transfert de matière:
HUTL= L ⁄ KLa
⁄ S
HUTG= G ⁄ KGa
⁄ S
La
hauteur totale de garnissage nécessaire est le produit du nombre
d'unités de transfert par la hauteur d'une unité de transfert.
Htot
= NUTL×HUTL
= NUTG×HUTG
Unités
KL, KG |
KLa, KGa |
X, Y |
L, G |
mole/"temps"/m² |
mole/"temps"/m³ |
fraction molaire |
mole/"temps" |
mole/"temps"/m²/(mole/m³) |
mole/"temps"/m³/(mole/m³) |
mole/m³ |
mole/"temps" |
mole/"temps"/m²/"pression" |
mole/"temps"/m³/"pression" |
pression partielle |
|
|
|
|
|
Exemple
d'application
Exemple tiré du Perry's 7ème édition, page 14-10
On
strippe de l'eau polluée par 38ppm poids de TCE (trichloréthylène) au
moyen d'un débit d'air atmosphérique sur une colonne de 0,45m de
diamètre et garnie, sur 3 mètres, d'anneaux Pall de 25mm, en
polypropylène.
L'ojectif est de faire tomber la teneur en TCE à 1,0ppm.
Le ratio molaire air/eau = 1/23,7
HUT
L = ⁄ K
La ⁄
S = 0,8 m
La loi de Henry s'applique avec un coefficient égal à 417
atm/(mole/mole).
Xe = 38/131,5*18 = 5,2 ppm mole
Xs = 1/131,5*18 = 0,14 ppm mole
Le débit minimum d'air est
G
min ⁄ L = (Xe
- Xs) ⁄ (K×Xe
- Ye) = (5,2-0,14) ⁄ (417×5,2-0) = 0,0023
Ys = L ⁄ G(Xe - Xs) + Ye = 23,7(5.2 - 0,15) + 0 = 120 ppm
ΔXML = [(Xe -
Xe*) - (Xs - Xs*)] ⁄ ln[(Xe - Xe*) ⁄ (Xs - Xs*)]
ΔXML = [(5,2 -
120 ⁄ 417) - (0,15 - 0)] ⁄ ln[(5,2 - 120 ⁄ 417) ⁄ (0,15 - 0)] = 1,3
Z = L(Xe - Xs) ⁄ KLa
⁄ ΔXML ⁄ S = 0,8(5,2 - 0,14) ⁄ 1,3 = 3,0 m