Débit
liquide minimum
Pour fonctionner efficacement, la surface du garnissage doit
idéalement être entièrement recouverte d'une pellicule liquide. Le
débit nécessaire pour obtenir ce résultat dépend de la surface à
mouiller et de la mouillabilité du matériau.
Le liquide au contact de
la surface du garnissage tend à former une goutte plus ou moins étalée.
Ceci est caractérisé par l'angle de contact. Un angle de contact faible
signifie que le liquide couvre bien la surface du matériau; le matériau
est bien mouillé. Un angle élevé indique que le liquide tend à se
ramasser en une goutte sphérique, laissant une large portion du
garnissage nu.
Si le matériau du
garnissage est plus difficilement mouillé par le liquide, le débit
minimum d'arrosage devra être supérieur. C'est généralement le cas des
matières plastiques qui sont généralement plus difficilement mouillées
par les fluides aqueux que les métaux ou les céramiques.
Certains traitements de surface permettent d'augmenter la mouillabilité
du matériau.
Déterminer précisément le débit liquide minimum semble difficile. Les
fournisseurs de garnissage préfèrent parler de débit "raisonnable". Les
valeurs communément admises sont regroupées dans le tableau ci-dessous:
Débit liquide raisonnable minimum
Matériau |
Débit mini
[m³/h/m²] |
céramique non vernissée |
0,5 |
céramique vernissée |
2 |
verre |
2,5 |
métaux corrodés (acier carbone, cuivre) |
1 |
acier inox traité |
1 |
métal brillant (acier inox, inox, ...) |
3 |
PVC |
3,5 |
Polypropylène |
4 |
Polymères fluorés (type PTFE) |
5 |
La mouillabilité du matériau dépend aussi de la nature du
liquide. Dans une colonne de distillation les garnissages en tête et en
pied sont souvent en contact avec des liquides de nature
différente. La mouillabilité du garnissage peut être modifiée, et le
pouvoir de séparation sensiblement affecté. Par exemple dans un
fractionnement du mélange eau-méthanol, le garnissage en présence d'un
liquide riche en méthanol, pourra être plus performant qu'en présence
de liquide riche en eau; la hauteur de garnissage nécessaire pour un
étage théorique (HEPT) sera plus faible.
Le débit minimum d'arrosage dépend également des possibilités
du distributeur de liquide. Leur débit minimum n'est souvent que de 50%
du débit nominal. S'il est surdimensionné et ne peut plus
assurer une répartition uniforme du liquide à faible régime, le pouvoir
de
séparation de la colonne peut se dégrader rapidement.
Débit
liquide maximum
La charge liquide maximum recommandée pour du garnissage vrac
est:
Taille des éléments
|
Charge liquide maxi [m³/h/m²]
|
20mm |
60 |
25mm |
90 |
40mm |
130 |
50mm |
170 |
90mm |
300 |
Le débit maximum d'arrosage dépend également de la capacité
maximum du distributeur de liquide. Au delà de sa capacité maximum, la
répartition ne sera plus uniforme et le pouvoir de séparation peut se
dégrader rapidement.
Lorsque gaz et liquide s'écoulent à contre-courant, chacun
tend à contrarier le mouvement de l'autre; le gaz tend à
empêcher
l'écoulement gravitaire du liquide, et le liquide tend à empêcher le
cheminement du gaz. Si le trafic dans la colonne devient trop
important, l'écoulement du liquide devient insuffisant, il s'accumule
dans la colonne: c'est l'engorgement (flooding). Le rétromélange du
liquide devient important, les performances de la colonne (pouvoir de
séparation) se dégradent dramatiquement. L'indicateur préféré pour
suivre et anticiper ce phénomène est la mesure de perte de charge subie
par le gaz.
La perte de charge de la colonne augmente avec le débit gazeux. Elle
est proportionnelle:
- au carré de la vitesse gazeuse
- à l'inverse de la masse volumique du gaz
Elle augmente aussi avec la charge liquide et avec la viscosité du
liquide qui favorise son accumulation sur le garnissage.
Perte
de charge sur le garnissage
Les fournisseurs de garnissage proposent des graphes donnant la perte
de charge observée en fonction du trafic gaz et liquide; ils sont
tracés avec:
en abscisse, un facteur de capacité gaz qui est le produit de la
vitesse du gaz dans la colonne vide par la racine carré de sa masse
volumique; ceci est équivalent à la racine carré de la pression
dynamique du gaz, c'est pourquoi l'unité est parfois la racine carré
d'une unité de pression (Pa
0,5 si vitesse en m/s
et masse volumique en kg/m³).
Les courbes sont tracées pour différentes charges de liquide. Elle est
exprimée en débit volumique par unité de section de la colonne (m³/h/m²
par exemple).
Ces graphes sont
généralement établis pour un système eau-air. L'extrapolation à
d'autres fluides n'est pas aisée.
Les corrélations permettant de prévoir la perte de charge sur le
garnissage, quels que soient les fluides, sont nombreuses; elles sont
désignées par l'acronyme GPDC (General Pressure Drop Correlation).
Une des plus couramment
utilisée est celle développée par Leva en 1951 qu'il a révisée en 1992.
Elle a donné lieu à une représentation graphique imaginée par J. S.
Eckert en 1961 (Chemical Engineering Progress 57(9): 54) et modifiée
par Ralph E. Strigle en 1994 (Packed Tower Design and Applications.
Houston: Gulf Publishing); elle est reprise dans la plupart des
publications traitant de ce sujet.
Outre les propriétés du gaz et du
liquide en circulation, elle fait appel à un paramètre caractérisant le
garnissage, le "Packing Factor", pour représenter l'influence de la
taille et la forme du garnissage sur la perte de charge.
Le "Packing Factor" est déterminé expérimentalement et on trouve assez
facilement dans la littérature la valeur à prendre pour un grand nombre
de garnissages courants. Attention! ce paramètre n'est pas sans
dimension; elle est l'inverse d'une longeur; son unité est le mètre
dans le système international mais souvent le pied (ft) dans les
publications anglo-saxonnes.
Limite
d'engorgement
Pour le dimensionnement d'une colonne garnie, il est surtout important
de déterminer les conditions de trafic à l'engorgement. Le choix du
garnissage et le diamètre de la colonne seront choisis de telle manière
que le trafic de gaz et liquide soient entre 60 et 80% du trafic
provoquant l'engorgement.
L'engorgement se produit pour une valeur de perte de charge sur le
garnissage qui dépend du type de garnissage. H. Kister et D. Gill
(Predict flood point and pressure dropnfor modern random packings.Chem.
Eng. Prog.1991,87(2), 32) ont proposé
de relier la perte de charge à la limite de l'engorgement au "Packing
Factor". Les conditions de trafic dans la colonne peuvent être tirées
de la corrélation proposée par M. Leva en 1992 (Reconsider packed-tower
pressure drop correlations.Chem.
Eng. Prog.1992
,
88,
65):
Règle du pouce
En utilisation à contre-courant, l'engorgement se produit pour
une perte de charge de 10 à 15mbars/m. Pour des systèmes non moussants,
les colonnes doivent donc être dimensionnées pour des débits égaux à
80% du débit donnant une perte de charge de 10mbars/m.
Débit maximum du gaz
Pour déterminer le diamètre d'une colonne, on doit déterminer quel est
la vitesse maximum de gaz que le garnissage peut accepter. Dans une
colonne fonctionnant à contre-courant, plus la vitesse du gaz est
grande, plus la résistance à l'écoulement du liquide et la perte de
charge rencontrée par le gaz seront grands.
Une vitesse de gaz trop élevée peut provoquer un phénomène appelé
engorgement (
flooding),
où le liquide ne pouvant plus s'écouler rempli la colonne. Dans ces
conditions, l'opération devient impossible.
L'examen des courbes de perte de charge proposées par les fournisseurs
de garnissage permet de déterminer les conditions optimum
d'exploitation. Elles représentent l'évolution de la perte de charge du
garnissage par unité de hauteur (mbars/m, in water/ft, ...) en fonction
d'un facteur de débit qui est la combinaison de la vitesse du gaz par
la racine carré de sa masse volumique (m/s(kg/m
3)
0,5,
ft/s(lb/ft
3)
0,5). Cette
expression est analogue à la racine carré d'une pression dynamique;
l'unité peut alors également être la racine carré d'une pression ((Pa)
0,5
par exemple). Ces courbes sont tracées en coordonnées log-log. Elles
sont généralement établies pour un système air-eau.
Elles sont tracées
pour différents débits d'arrosage de liquide et comportent toujours une
courbe pour le garnissage sec (débit liquide = 0). En effet, le débit
de liquide formant un film à la surface du garnissage, occupe une
partie de l'espace vide du garnissage. La section de passage pour le
gaz est réduite et la perte de charge est augmentée. Le volume occupé
par le liquide augmente avec le débit d'arrosage.
Les courbes peuvent présenter trois domaines reflétant trois
comportements:
- une partie rectiligne pour les débits de gaz les plus
faibles; la courbe correspondant au garnissage sec est rectiligne dans
tout le domaine. Le garnissage
arrosé se comporte comme le garnissage sec excepté la section de
passage qui est réduite. Cela se traduit par une pente de la courbe du
garnissage arrosé, identique à celle du garnissage sec. Il n'y a pas
d'interaction particulière entre le gaz et le liquide.
- au delà d'un certain débit, la pente de la courbe augmente,
se différenciant de celle du garnissage sec. Ce point est appelé point
de chargement (loading point).
Le liquide commence à s'accumuler sur le garnissage, créant un surcroît
de perte de charge.
- au delà d'un autre débit, supérieur au point de charge, la
pente de la courbe augmente encore. C'est le point
d'engorgement (flooding
point). La colonne est alors entièrement remplie de
liquide et le gaz chemine au travers sous forme de bulles.
Le garnissage doit absolument être exploité dans le domaine de débit
inférieur au point de chargement.
Le débit maxi recommandé est 80% du débit de gaz provoquant
une perte de charge sur le garnissage de 10mbars/m.
Le tableau ci-dessous donne une évaluation de ce débit pour:
- de l'air à P atmosphérique (1,25kg/m³)
- une charge d'eau liquide de 50m³/h/m²
Type de
garnissage |
Débit d'air
[kg/h/m²] |
étages
/mètre |
hold up
[lit/m³] |
Pall métal |
13mm |
5000 |
_ |
_ |
25mm |
6000 |
1 à 2 |
120 |
50mm |
9000 |
_ |
60 |
Pall plastique |
15mm |
4300 |
_ |
_ |
25mm |
5900 |
1 à 2 |
_ |
30-35mm |
6500 |
|
|
50mm |
8600 |
_ |
_ |
90mm |
10900 |
|
|
Pall céramique |
25mm |
4000 |
_ |
_ |
30-35mm |
5700 |
|
|
50mm |
6500 |
_ |
_ |
Raschig
céramique |
|
|
|
|
vrac optimisé |
_ |
7 à 13000 |
_ |
_ |
Structuré |
_ |
8 à 10000 |
2 à 4 |
_ |
Structuré très
haute capacité |
_ |
15000 |
1,5 à 2,5 |
_ |
Le débit de gaz admissible dépend de:
- la masse volumique du gaz
- la masse volumique du liquide
- le débit liquide
- la viscosité du liquide
Effet de la masse volumique du gaz:
Masse volumique du gaz
[kg/m3] |
0,01 |
0,1 |
1,25 |
10 |
débit relatif |
0,09 |
0,3 |
1 |
2,8 |
Effet de la masse volumique liquide:
Masse volumique du liquide
[kg/m3] |
700 |
1000 |
1500 |
débit relatif |
0,8 |
1 |
1,2 |
Effet du débit liquide:
Débit de liquide
[m³/h/m²] |
10 |
25 |
50 |
75 |
125 |
débit relatif |
1,6 |
1,3 |
1 |
0,75 |
0,4 |
Coefficient de transfert de masse KGa
Cette présentation du problème donne l'illusion que la HEPT
est une caractéristique du garnissage. En réalité, de même qu'en
distillation l'efficacité d'un plateau réel varie avec le mélange à
distiller, la HEPT d'un garnissage varie avec le système gaz-liquide
traité. C'est pourquoi les fournisseurs de garnissage ont pris
l'habitude, pour les systèmes d'absorption et de stripping, d'indiquer
un paramètre plus fondamental qui est le coefficient de transfert de
masse KGa.
La quantité de matière transféré d'une phase vers l'autre est
proportionnelle à une différence de concentration. Globalement sur une
colonne:
- la quantité de matière transférée de ou vers la phase gaz
est = KG(y-y*)
- la quantité de matière transférée de ou vers la phase
liquide est = KL(x-x*)
La quantité de matière transférée d'une phase vers l'autre étant la
même:
KG(y-y*)
= KL(x-x*)
Les fractions molaires en phase gazeuse peuvent aussi s'exprimer en
pression partielle; d'où K
G(p-p*) = K
L(x-x*)
La hauteur de
garnissage nécessaire est donné par la relation:
H = NUT
G×
G⁄
KG·a
H: hauteur de garnissage [m]
NUT
G: nombre d'unité de transfert pour la phase
gazeuse
G: débit gazeux [mole/m²/s]
K
G: coefficient de transfert de masse de la
phase gazeuse [mole/m²/s] ou [mole/m²/s/atm]
a: surface spécifique du garnissage [m²/m³]
La surface spécifique du garnissage "a" est celle qui participe
réellement à l'échange; ce n'est pas une donnée purement géométrique et
elle n'est généralement pas accessible. C'est pourquoi le plus simple
est de déterminer expérimentalement le produit K
G·a.
C'est cette valeur qui est reportée dans les brochures des fournisseurs
de garnissage.
La hauteur de garnissage nécessaire pour effectuer
un
transfert donné, est fonction de la vitesse de l'échange entre le
liquide et le gaz.
Si le gaz à absorber est très soluble dans le
liquide (HCl
dans l'eau),
ou réagit avec le liquide (SO2 dans la soude),
le transfert sera limité
par la vitesse de migration du produit au travers du gaz. Il sera
amélioré par une augmentation de la vitesse du gaz dans la colonne, et
dans une mesure moindre aussi par le débit liquide.
En première approximation:
KGa2 =
KGa1
(L2 ⁄ L1)0,3
x (G2 ⁄ G1)0,8
Si la solubilité du gaz à absorber est faible (O2
dans l'eau), la
vitesse de transfert sera limitée par la vitesse de renouvellement du
liquide en contact avec le gaz. Il sera amélioré par un accroissement
du débit liquide.
En première approximation:
KGa2
=
KGa1
(L2 ⁄ L1)0,3
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