On classe les plateaux en deux types principaux:
- les plateaux à courants croisés
- le plateaux à contre-courant ou "dual-flow"
Les plateaux à courants croisés sont les plus répandus. On distingue
les plateaux:
- à cloches
- perforés
- à clapets mobiles
- à clapets fixes
Seuls
les plateaux à cloches et les plateaux perforés ont fait l'objet de
suffisamment de publications pour en dégager des méthodes de
dimensionnement publiques fiables. Les méthodes publiées pour le
dimensionnement des plateaux perforés peuvent servir de base pour les
dimensionnements préliminaires de colonnes à plateaux d'autres types à
l'exception des plateaux à cloches. Le dimensionnement de plateaux à
clapets reste réservé aux fournisseurs de ce type de technologie,
propriétaires de leur conception. On peut s'attendre à ce que les
performances des plateaux à clapets soient supérieures, pour un coût lui aussi plus élevé.
Le
dimensionnement d'une colonne de distillation consiste à déterminer son
diamètre (ou ses diamètres si deux sections de
diamètres différents sont justifiées) et sa hauteur.
Hauteur
de la colonne
La hauteur de la colonne résulte:
- du nombre d'étages théoriques nécessaires (Npth)
- de l'efficacité de chaque plateau réel (eff)
- de l'espacement entre plateaux (TS pour "Tray Spacing")
Elle sera donc égale à:
Npth
÷ eff × TS
à laquelle il faut ajouter:
- un espace pour un dévésiculeur en tête
- un espace pour le retour du rebouilleur
- un espace supplémentaire pour l'alimentation dans le cas
d'une
distillation
Nombre
d'étages théoriques
Le
nombre d'étages théorique ne dépend pas de la technologie choisie
(plateaux ou garnissage) pour effectuer l'opération (distillation,
absorption ou stripping). Il résulte seulement des propriétés des
substances et des degrés de pureté souhaités.
Le nombre de plateaux théoriques est déterminé par simulation d'une
situation réelle ou projetée, prenant en compte les différents
paramètres de
fonctionnement (pression et températures, débits d'alimentation et de
reflux, composition des flux d'alimentation, de distillat et de résidu,
...).
Efficacité
des plateaux
L'efficacité globale des plateaux d'une colonne de distillation est le
rapport du nombre de plateaux théoriques dont la colonne est capable
sur le nombre de plateaux réels.
L'efficacité des plateaux est influencée par la volatilité relative des
constituants à séparer et la viscosité du mélange. Des corrélations
existent permettant de prédire l'efficacité des plateaux en fonction de
la nature des mélanges à séparer. La plus utilisée a été proposée par
O'Connell en 1946 (
O’Connell, H. E., “Plate Efficiency of
Fractionating Columns and Absorbers,” Transactions of the American
Institute of Chemical Engineers,42, pp. 741–775 (1946))
eff = 0,503(α.µL)-0,226
α: volatilité relative
µ
L: viscosité en mPa.s ou centipoise
Espacement
entre plateaux
Les
colonnes de faible diamètre (<1m), sont constituées de tronçons
reliés par des brides, les plateaux sont montés en cartouches et
installés
sans intervension humaine à l'intérieur de la colonne. L'espace entre
plateaux n'est dicté que par le besoin de laisser suffisamment d'espace
pour assurer une bonne séparation du gaz et du liquide, afin de limiter
les
entraînements.
Les colonnes de plus fort diamètre (>1m), sont
entièrement soudées, les plateaux doivent être introduits démontés, par
des "trous d'homme" de faible diamètre, puis assemblés à l'intérieur.
Pour
cela ainsi que les opérations de maintenance ultérieures, l'espace
entre les plateaux doit permettre le travail d'un homme couché; il sera
de 30cm au minimum, mais de préférence de 40 à 50 cm.
Diamètre
de la colonne
Le diamètre de la colonne est tel que:
- la surface offerte sur le plateau pour le bullage du gaz
n'occasionne pas d'entraînement excessif de liquide par le gaz; elle
dépend des propriétés des substances et de l'espacement entre plateaux.
- la section de passage des descentes de liquide n'occasionne
pas
d'entraînement excessif de gaz par le liquide
La section de la colonne est la somme de:
- la section occupée par les descentes (section d'entrée + section d'arrivée)
- la surface active de bullage
Section
des descentes
Le
liquide passant le barrage de sortie du plateau est encore une émulsion
avec le gaz de bullage. La section des descentes doit être suffisante
pour permettre la séparation par décantation du gaz entraîné avec le
liquide afin qu'il soit clair lors de son introduction sur le plateau
inférieur.
Le choix de la section consacrée aux descentes repose sur
des critères empiriques de temps de séjour ou de vitesse de liquide
clair. Ils sont résumés dans le tableau ci-dessous
Critères de dimensionnement des descentes de plateaux
Tendance au moussage
(type de séparation) |
Vitesse en liquide
clair
[m/s] |
Temps de séjour
[s] |
Faible
(eau-air, hydrocarbures légers à faible pression <7 bars) |
0,1 - 0,2 |
3 |
Moyen
(hydrocarbures à pression moyenne 7 à 20 bars) |
0,1 - 0,2 |
3 |
Elevée
(amines, glycols, hydrocarbures légers à pression élevée > 20
bars) |
0,05 - 0,1 |
9 |
La
section totale de passage des deux descentes devrait représenter au
moins 6% de la section totale de la colonne, et de préférence autour de
10%.
Surface de bullage
La surface consacrée au contact entre le gaz et le liquide sur le
plateau. Sur cette zone, le plateau est équipé d'organes permettant
d'optimiser ce contact; ce sont:
- des orifices
- des clapets fixes ou mobiles
- des cheminées surmontées de cloches
- ...
Vitesse maximum du gaz
La
vitesse du gaz dans l'espace entre les plateaux est choisie pour
limiter les entraînements de liquide. Le calcul de la vitesse limite
(
Flood velocity U
F) fait
appel au coefficient de Souders et
Brown C
SB
UF = CSB×SF×((ρL
- ρV)
⁄ ρV)0,5
Différentes corrélations ou graphes ont été proposés pour
déterminer le
coefficient de Souders et Brown.
La plus connue a été proposée par J. R. Fair en 1961 (How
to Predict Sieve Tray Entrainment and Flooding, Petro/chem. Engr., 33
(10), pp. 45–62,1961) et a longtemps servi référence.
Elle
se présente sous la forme d'un réseau de courbes représentant C
SB
en fonction d'un paramètre de débit "F
LV", pour
différents espacements
de plateaux. Des régressions en ont été proposées pour l'utilisation
par les calculateurs; on pourra retenir celle proposée par A. I.
Lygeros et
K. G. Magoulas (
Column flooding and entrainment. [Estimation
of maximum allowable vapor velocity and entrainment in a distillation
column] Hydrocarbon Proc. 65(12), 43, 1986).
L'une des corrélations les plus récentes pour évaluer le
coefficent de Souders et Brown en fonction des paramètres opératoires a
été proposée par H. Z. Kister et J. R. Haas (Predict
Entrainment Flooding on Sieve and Valve Trays, Chem. Eng. Progress, 86
(9), pp. 63-69 Sept. 1990). Son application est
limitée au domaine où l'entraînement de liquide est le facteur limitant
(pour FLV < 0,5).
Pour les liquides moussants, un coefficient de réduction de
la vitesse (System Factor SF) est appliqué:
Système
|
Coefficient de
réduction
de la vitesse de gaz
("System Factor" SF)
|
tension
superficielle
[dynes/cm]
|
non moussant
|
1,0
|
>12
|
peu moussant
(régénérateurs d'amine ou de glycol)
|
0,85
|
6,5 - 12
|
assez moussant
(absorbeurs aux amines ou aux glycols)
|
0,73
|
2 - 6,5
|
très moussant
(unités de méthyl éthyl cétone)
|
0,6
|
0,4 - 2
|
formant une mousse
stable
(régénérateurs de soude)
|
0,3
|
< 0,4
|
Le phénomène de moussage est un phénomène complexe,
difficilement prédictible. Le retour d'expérience est souvent le seul
moyen d'identifier l'effet du moussage sur les performances d'une
colonne. Cependant pour les liquides présentant une tension
superficielle faible (<20 dyn/cm), le coefficient de réduction
de la capacité est évalué par la relation proposée par J. R. Fair
(Design of Equilibrium Stage Processes, 1963):
SF = (σ ⁄ 20)0,2
Enfin la vitesse maximum retenue pour le dimensionnement de la colonne
sera inférieure à la vitesse limite. Le facteur de réduction appliqué
est nommé "Flood Factor" (FF). On
retiendra
par exemple une vitesse égale à 80% de la vitesse limite.